Plus de temps, plus de temps, j’ai besoin de plus de temps, plus de temps, plus plus plus de temps temps temps, plus de temps …
Texte de Grace Bell Traduit par Frédéric
... oh, pardon, je ne vous avais pas vus.
J’étais bien occupée : je devais rassembler des documents pour la prochaine retraite, faciliter la session « L’année de l’investigation », acheter des biscuits à la cannelle sans gluten et des craquelins au sésame, des pommes et des noix, rassembler des stylos et des porte-blocs, appeler le service de nettoyage pour qu’ils nettoient à fond, passer moi-même l’aspirateur et faire la poussière, travailler avec mes clients, faire une lessive, rencontrer mon co-formateur pour un cours de l’Institut pour le Travail en novembre, passer une heure sur le nouveau programme «Eating Peace Process» et installer des chaises pour une réunion «Eating Peace».
Tout cela en entendant ma voix intérieure qui par moments me disait… euh, je veux dire me criait…
... tu as BESOIN DE PLUS DE TEMPS !
Cela semble vrai.
À l’instant même où j’ai réalisé que j’avais une deuxième réunion programmée dans une semaine, j’ai pensé : « Mais pourquoi est-ce que j’ai fait ça, juste avant la retraite ??!! »
En attendant que les gens arrivent, j’étais en train de penser « Waouh, c’est fou ce que je pourrais faire si j’avais deux heures de plus, juste maintenant. »
La recherche ou la revendication d’avoir davantage de temps pointe son nez dans tellement de circonstances :
Quelque chose doit être trouvé, achevé, accompli, fait, terminé, satisfait, obtenu, gagné, fini.
C’est pour ça que j’ai besoin de plus de temps.
Voici une question fabuleuse, que j’ai entendue pour la première fois de la bouche de Byron Katie, qui met vraiment tout cette histoire de « besoin de plus de temps » face à nous, en plein milieu, avec un gros projecteur braqué sur dessus :
Qu’est-ce que j’aurais, si cette chose était « faite » ou « accomplie » ?
Qu’est-ce que j’aurais, si j’avais davantage de cette chose appelée « temps » ?
Ou si tout, absolument tout, était maintenant réglé, achevé, toutes les tâches terminées ?
La réponse qui me vient à l’esprit ?
La Liberté. Libre de faire CE QUE JE VEUX. Libre de passer à la chose suivante. Libre d’essayer quelque chose de nouveau. Libre de Ne Pas Travailler. Libre de vivre PLUS.
Hmmm.
Ai-je vraiment besoin de plus de temps pour faire l’expérience de la liberté ? Est-ce vrai que j’ai besoin de vivre PLUS ? Plus de vie, plus de jours, faire plus de choses que j’aime, plus de plaisir, plus de bonheur, plus d’éveil, plus d’attention, plus de bonté, plus d’amour, plus d’aventure ?
Ai-je réellement besoin de « plus » ?
Pfiou. Haha. Ça semble plutôt drôle à cet instant. Et ce n’est pas une mince affaire. Une idée dominante et très répétitive.
Jetons-y un coup d’œil.
J’ai besoin de « plus » de temps que j’en ai maintenant.
Est-ce vrai ?
Non.
Comment pourrais-je seulement savoir que c’est vrai ?
Je ne suis même pas sûre de pourquoi je veux « plus » ! Je remarque qu’il y a un flux, il y a quelque chose qui se passe, j’appelle ça le temps, je décide qu’il m’en faut plus, j’essaye de contrôler ma journée, mon rythme, mon processus, ma vie, mon bonheur, et je crois que c’est possible si j’ai PLUS de quelque chose qui apparemment n’est pas là en ce moment.
Pas exactement sans stress, cette idée qu’il faut PLUS, de tout… y compris du temps.
Quand j’ai la pensée, je vois des images et des visions qui me hantent, de ce qui m’attend dans le futur. Des tâches inachevées. Des rêves inaccomplis. Une vie écourtée.
Je me menace moi-même avec le besoin de « plus » de cette chose appelée le temps. J’exige, j’attends, j’espère en avoir BEAUCOUP.
Avec la croyance, j’ai l’impression de me pencher en avant, de courir vers l’avant, parfois comme s’il y avait un vent contraire qui m’empêchait d’avancer. Comme si j’avais quelqu’un qui me criait dans le futur, au loin à l’horizon, d’aller plus vite, d’être plus efficace, plus rapide, et ne pas abandonner !
C’est vraiment stressant comme projet, idée, désir, vision.
Qui serais-je sans cette croyance ? Sans cette pensée que j’ai besoin de plus de temps, plus, plus, plus de temps ?
Debout ici maintenant, avec des jours qui sont comptés. Aucune idée de combien, mais clairement ils sont comptés.
Sachant qu’il y a une fin à cette vie telle que je la connais, et que c’est tout à fait OK. C’est comme ça.
Sans cette croyance qui me défile dans l’esprit, je pourrais m’ouvrir à l’idée que cet instant est précieux, doux, suffisant. Rien de plus n’est nécessaire. Aucun jour futur n’est nécessaire.
Cela ne signifie pas que j’arrête de faire quoi que ce soit. Je remarque que j’écris ceci. Des doigts tapotent sur un clavier. Je fais une pause et regarde par la fenêtre pour contempler la rosée du matin sur l’herbe verte pendant un moment.
Je remarque une horloge ici dans la pièce, et la conscience de mon planning pour la journée qui est très chargé, et les quatre prochains jours bloqués pour la retraite avec les gens qui viennent.
Sans la pensée J’ai besoin de plus de temps, ce moment me semble joyeux. Assez.
Nous mourrons tous un jour. J’aurai quitté ce corps, cette vie, cette construction un jour.
Sans la pensée « j’ai besoin de plus de temps », je remarque une telle beauté dans la pièce où je suis à cet instant, les visages des gens que j’aime flottant dans mon esprit, des visions des gens qui voyagent aujourd’hui pour venir à la retraite, que je vais rencontrer pour la première fois, un voyage en cours…
… mais CET instant maintenant est plein de silence et le réfrigérateur ronronne très doucement.
Assez, assez, assez.
Chhhhhhh.
Chut, calme, excitation, joie, paix.
Gratitude d’avoir cet instant. Je pourrais être partie dans une heure, pour autant que je sache (et j’aime le fait que je n’en ai aucune idée). Monde merveilleux, se déployant en un jour nouveau que je vais vivre, un autre matin s’épanouissant.
Sans la pensée, je remarque la douce soirée d’hier soir qui n’a absolument rien accompli pour la retraite qui commence demain (apparemment), mais la joie de se connecter à des gens qui sont venus apprendre à faire le Travail à propos des comportements compulsifs. J’ai dû écouter profondément, entendre leurs mots, entendre leurs questions. J’ai complètement oublié la longueur de la liste des choses à faire. Besoin de rien sur cette liste.
Retourner la pensée : Je n’ai PAS besoin de plus de temps. J’ai besoin de moins de temps. Ma pensée a besoin de plus de temps. J’ai besoin de plus de moi-même, à cet instant.
Ooooh, voici que je donne du temps à ma pensée, en écrivant cette Note de Grace, en interrogeant les pensées de « plus ». Voici que je ressens cet instant, maintenant, et que je m’ouvre à l’idée que c’est beaucoup, c’est assez, c’est génial.
Je n’ai pas besoin de plus de temps pour finir quoi que ce soit, écrire ce livre, trouver l’amour, régler cette relation qui me pèse, ressentir, m’éveiller, vivre.
Toutes ces choses se passent juste maintenant. Juste maintenant.
« Tout ce qui semble permanent est en vérité impermanent et sera anéanti… Juste maintenant, à cet instant même, vous vous tenez sur une terre sainte et sacrée, car ce qui sera perdu n’a pas encore été perdu, et réaliser cette chose simple est la clé d’une joie indicible… Tout est présent. » Jeff Foster, extrait de L’acceptation la plus profonde.
Même l’avenir imaginaire que j’obtiendrais avec plus de temps n’est pas quelque part dans le futur comme un moment de bien-être.
Malgré cette quantité de temps dont je dispose…
… ou peut-être du fait que j’ai peu de temps, du temps perdu, que je n’ai plus le temps…
… je peux ralentir, même m’arrêter, et ressentir la gratitude d’ignorer absolument l’impermanence, le merci pour cette journée, maintenant, et rien de plus.
Fini le temps requis ou nécessaire.
Comme c’est très excitant !
Avec beaucoup d’amour,
Grace
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